Qu’est ce que maman comprend à l’amour ! (The Reluctant Debutante) de Vincente Minnelli : Minnelli à Londres

Vincent Minnelli à Londres filmant les bals de « La Saison », cette période de l’année durant laquelle l’aristocratie anglaise organise des bals où sa jeune fleur est lancée dans la société pour trouver l’âme soeur. Tel est l’argument de cette comédie où Minnelli porte un regard satirique sur les moeurs patriciennes de la lointaine Albion, cette cousine compassée de l’Amérique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Angleterre n’en sort pas grandie et que les scénaristes américains du film ne font pas dans la dentelle. Le film prend le contrepied des romans d’Henry James montrant de candides américains aux prises avec les moeurs subtiles de l’Europe. Ici, ce sont les jeunes américains qui sont raisonnables et lucides tandis que les anglais rivalisent de snobisme et d’égocentrisme, quand ils ne sont pas menteurs, sans compter ce jeune Lord anglais abuseur sexuel en série (qui continuera néanmoins ses méfaits). Seul échappe au jeu de massacre Lord Broadbent (Rex Harrison et son début ultra-rapide) qui accueille à l’occasion de La Saison sa fille Jane, une américaine issue d’un premier mariage. Il ne s’en laisse pas compter, l’expérience de la cinquantaine aidant, et est parfaitement conscient du fait qu’il s’agit de trouver un mari aristocrate « comme il faut » à Jane, mais il accepte pour avoir la paix de laisser sa seconde femme, Sheila Broadbent (Kay Kendall), chaperonner sa belle-fille sur les pistes de danse – le titre français n’a de fait aucun rapport avec l’histoire.

La dentelle, c’est donc Minnelli qui l’apporte par sa mise en scène : elle égalise les personnages, en les mettant la plupart du temps à la même place dans le plan, elle fait voir les rituels des bals et de la vie de famille (la vie est une scène, motto millennien, et Lord Broadbent en est lui-même convaincu), elle compense ce que le scénario possède d’unilatéral et de condescendant dans son regard sur les anglais. Des quiproquos (les deux prétendants de Jane, l’anglais et l’américain, s’appellent tous deux David) viennent apporter quelques péripéties au récit, mais elles restent attendues, la morale étant sauve – chez Minnelli, les apparences sont essentielles – quand il s’avère que le batteur de jazz américain dont s’est éprise Jane n’est autre qu’un Duc, réconciliant ainsi les aspirations du récit à l’entre-soi américain et le snobisme jamais pris en défaut de Lady Broadbent, ravissante idiote que Lord Broadbent regarde avec l’indulgence de l’amoureux grisonnant (Rex Harrison et Kay Kendall étaient mari et femme à la ville). En fausse amie et vraie garce, mais toujours avec les manières affectées de son aristocratique milieu, Angela Lansbury apporte un peu de sel à l’ensemble. Les adultes sont bien plus déraisonnables et anxieux que la jeunesse, affirme le cinéaste.

Un Minnelli mineur reste toujours élégant. Les bijoux brillent, les parures chatoient, et il réutilise ici la chanson The Boy next door que l’on entendait dans Le Chant du Missouri.

Strum

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